Suivi d'une nouvelle île de l'estuaire de la Gironde

Une nouvelle île sur le littoral atlantique
à l’exutoire de l’estuaire de la Gironde

 

Une apparition récente
Au début de l’année 2009, une nouvelle île d’une surface de 4 ha est apparue à l’exutoire de l’estuaire de la Gironde, face à l’océan, à 2,5 kilomètres du phare de Cordouan.

 L’apparition d’une nouvelle île sur les côtes de France reste un phénomène rare et localisé. En effet, le contexte actuel est plutôt à l’érosion où 50 % des plages de l’hexagone régressent. Dans ce secteur, la naissance d’une île n’est pas un phénomène nouveau. Il y eu un précédent, l’île d’Armotte au début de notre ère… Cette apparition résulte de phénomènes géomorphologiques complexe et de l’impact des épisodes tempétueux (érosion littorale, apport de sédiments par le fleuve, tempête Klaus …).

 

Une évolution étudiée
La formation et l’évolution de cette île fait l’objet de toute notre attention tant ce phénomène est original et remarquable. Le banc de sable sur laquelle repose l’île, près du plateau de Cordouan, est découvert sur environ une centaine d’hectares à marée basse. A l’automne 2009, une surface de 4 ha restait émergée à marée haute (coeff. 70, peu de houle). Suite à l’ouragan Xynthia, l’île a subit une translation vers l’est de plus ou moins 115 m. Le 27 juin 2010, la surface de l’île était de 3 ha à marée haute (Coeff. 78, houle faible).

Relevé du contour de l’île par GPS en blanc
septembre 2009 et en jaune juin 2010

L’analyse de la forme des grains de sable qui constituent cette île, montre une origine complexe, à la fois océanique et estuarienne.

 

Les espèces candidates à la colonisation
En 2009, quatre mois après l’apparition de cette île, la végétation s’est développée grâce à l’apport naturel de graines par les marées. A l’automne 2009, onze espèces végétales ont pu être identifiées caractérisant l’habitat du haut de plage, avec : Cakile maritime Cakile maritima, Soude brûlante Salsola kali, Arroche des sables Atriplex laciniata ; et l’habitat de la dune embryonnaire : Chiendent des sables Elymus farctus, Oyat Ammophila arenaria, Liseron des sables Calystegia soldanella, Euphorbe maritime Euphorbia paralias, Renouée maritime Polygonum maritimum.

D’autres espèces plus surprenantes ont été notées comme : Zostère naine Zostera noltii, Spartine anglaise Spartina townsendii, Roseau Phragmites australis. L’ouragan Xynthia a entraîné une submersion totale de l’île avec un déplacement des sédiments, la végétation a été totalement détruite. Cependant, 3 pieds de Cakile maritime ont été notés fin juin 2010. Ils ont été, depuis, détruis par la sur fréquentation humaine de l’île. Ce travail nous a permis d’inventorier une trentaine d’espèce d’invertébrés dans les différents écosystèmes : sable nu, jeune laisse de mer, vieille laisse de mer, bois flottant, plante… Certaines sont bien adaptées aux écosystèmes de cette nouvelle l’île : Puce de mer Talitrus saltator (Crustacés Amphipode), Fucellia sp. (Diptère Anthomyidé), Remus sp. et Cafius sp. ( Coléoptère, Staphylinidé), Cloporte Porcellio scaber forme grise (Crustacé, Isopode), Mesites aquitanus (Coléoptère, Curculionidé), Phaleria cadaverina (Coléoptère, Ténébrionidé).

D’autres ne pourront pas fonder de populations car elles ne sont pas adaptées à ces écosystèmes : Fourmis, Guêpes, Coccinelles, différentes espèces de papillons Rhopalocères (Vulcain Vanessa atalanta, Paon du jour Inachis io, Piéride du chou Pieris brassicae, Colias sp…), des Libellules Anisoptères (Sympétrum fascié Sympetrum striolatum, Sympétrum méridional Sympetrum meridionale…)…

Quel avenir pour ce nouveau bout de terre ?
Il est difficile de prévoir l’évolution de cette nouvelle île tant sa formation est récente et du fait de sa fragilité face aux diverses pressions. Cependant, suivre la colonisation d’une nouvelle île par les espèces vivantes reste exceptionnelle en Europe. Si nous voulons préserver ce nouveau milieu, il est nécessaire de mener des actions de sensibilisation comme les panneaux d’information placés sur l’île et d’entamer un débat écocytoyen. Cette île témoigne que l’estuaire de la Gironde est bien vivant et qu’il reste le dernier plus grand et sauvage estuaire d’Europe !

Panneau de sensibilisation placé sur l'île en 2010

 


 Jean-Marc Thirion d'OBIOS collectant la biodiversité de cette nouvelle île, assisté par des enfants venus passer la journée sur l'île.

 

Remerciements : Nous aimerions remercier tout particulièrement l’équipage de la vedette de la SNSM de Royan et son commandant Pierre Becker, le géologue Guy Estève, le botaniste Christian Lahondère, le premier adjoint de la ville de Royan Bernard Giraud ainsi qu’ Henri Jabet, David Passerault et Jean-Luc Thirion.

 


Plaquette de sensibilisation et d'information